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Jamais dans l’histoire contemporaine, en dehors des périodes d’occupation, nos pays prétendument démocratiques n’ont vécu une telle restriction des libertés fondamentales et un tel bouleversement des bases même de notre société. Tout cela à cause d’un virus dont la nuisance était prévisible depuis plusieurs semaines.

Depuis la mi-mars 2020, il est interdit sous peine d’amendes ou de peines de prison de circuler sans motif « essentiel », c’est-à-dire s’alimenter, faire des transactions financières, se soigner, travailler. Toute manifestation ou réunion est aussi prohibée. Les frontières sont fermées ôtant tout son sens au premier principe de base de l’Union européenne par ailleurs bien ébranlée : la liberté de circulation. L’école obligatoire et les universités sont abolies. Des millions de travailleurs sont mis d’office au chômage. Des milliers de commerces ont dû fermer à l’exception des grandes surfaces alimentaires. D’innombrables entreprises ont cessé leurs activités et plusieurs d’entre elles ne seront plus en mesure de les rouvrir.

Les gouvernements occidentaux ont prôné le télétravail sans en mesurer les conséquences sociales, économiques et de sécurité. Il n’y a aucun statut du « télétravailleur » et, en plus, il est isolé à son domicile qui devient une annexe à l’entreprise qui l’emploie. Quid par exemple du temps de travail, du salaire, du régime de sécurité sociale ? Pas de réponse ni du côté patronal, ni du côté syndical. Le télétravail fragilise les entreprises, car la sécurité informatique n’est plus garantie face aux cyber-attaques. Un PC n’est pas équipé pour y faire face et peut servir d’accès à une cyber-attaque visant l’entreprise ! Sur le plan économique, il y aura des conséquences indirectes – dont certaines peuvent être positives – par exemple sur les transports individuels comme collectifs, sur toutes les PME qui vivent dans l’environnement des grands centres économiques urbains ou périurbains qui seront sans doute transformés. En revanche, il faut s’attendre à un tsunami de fermetures d’entreprises avec les plans sociaux afférents et une désertification économique touchant de plein fouet des régions déjà en difficulté avec son cortège de chômage de masse et de misère. Le secteur aéronautique est d’ailleurs le premier touché : la compagnie belge SN Brussels Airlines désormais entre les mains de l’allemande Lufthansa, est au bord de la faillite. Ryanair annonce des réductions drastiques de salaires et du « dégraissage » de personnel.

La Commission européenne et le patronat ont déjà répondu. Le MEDEF exige l’allongement de la durée du travail pour rattraper le « temps perdu » tandis que la Commission prône l’accentuation des traités de libre échange pour relancer l’économie mondiale. De plus, elle rappelle que le traité budgétaire n’est que suspendu et reprendra dès la fin de la pandémie. En échange, on offre un hochet à l’opinion avec la potion magique du « new deal vert », un de ces sempiternels programmes économiques saupoudrés d’écologie qui va en principe donner une tout autre orientation. Ce n’est qu’un miroir aux alouettes de plus. Tant que le pouvoir absolu des entreprises transnationales s’exercera sur l’ensemble du monde capitaliste, rien de fondamental ne changera Et c’est sans compter avec la montée en puissance de la Chine qui petit à petit tente d’imposer son propre système, même si elle a montré certaines faiblesses pour le moment.

Bref, ceux qui pensent que le « monde d’après » sera meilleur se font de douces illusions. Tant que les rapports de forces ne seront pas profondément bouleversés, tout redeviendra comme « avant ».

ob cfaa34 covid 19 by fusion medical animation fUn méchant virus bouleverse le monde. Oui mais quel monde ?

Alors, soyons concret. Posons-nous deux questions essentielles.

Premièrement, a-t-on bien réagi face à la pandémie ?

La réponse est évidemment non. Tout d’abord, les gouvernements étaient avertis de la menace depuis le troisième trimestre 2019. L’OMS avait notifié aux Etats-membres qu’une pandémie allait survenir après celle du SRAS. Quand les risques de la pandémie étaient devenus inéluctables, les dirigeants ont été très lents à la détente et, souvent, n’ont pas pris les décisions adéquates. Ainsi, peut-on discuter du confinement généralisé qui cache mal une absence totale de politique de lutte contre la pandémie.

Cependant, n’accusons pas trop vite les politiciens actuels de la faiblesse de l’Etat, même si les plus anciens d’entre eux y ont contribué. Ils n’en sont que les héritiers ! En réalité, si la puissance publique est en pleine déliquescence, c’est le résultat de quarante ans de néolibéralisme. Un épisode est significatif de l’impuissance et aussi de l’incapacité de l’Etat : c’est la saga des masques en Belgique comme en France.

Les délocalisations et le libre échangisme ont vidé l’Europe et en partie les Etats-Unis de leurs capacités industrielles. Aussi, il faut importer les masques de pays d’Asie, essentiellement de Chine. Et en l’espèce, la Belgique est championne en la matière ! En 2017, le stock stratégique de masques a été détruit sur ordre de la ministre de la Santé Maggie De Block. Curieusement, en France aussi… Au début de la pandémie, le gouvernement belge commande une grande quantité de masques à des fabricants chinois. Arrivés à bon port, on constate qu’ils ne sont pas conformes ! Et cela s’est produit trois fois ! Tout récemment, le ministre belge de la Défense, le libéral Goffin, lance un appel d’offres pour des masques. Le fournisseur retenu est un… intermédiaire « boîte aux lettres » du nom de Avrox au Grand-Duché du Luxembourg ! Il doit fournir 15 millions de masques. En réalité, Avrox traite, ou prétend traiter, avec des fabricants chinois et vietnamiens. Cette société est dirigée par un jeune millionnaire jordanien, riche héritier et propriétaire de fonds d’investissements dans les îles Caïman, domicilié à Malte, en plus un jeune restaurateur camerounais qui officiait à Cannes et un personnage issu du milieu des joueurs à Nice. De grands spécialistes des masques médicaux, donc ! Ce serait un gestionnaire de risques qui aurait apporté la garantie à l’équipe du ministre Goffin.

ob 92c6a9 hamza talhouniHamza Talhouni, jeune héritier jordanien, administrateur délégué d'Avrox est un personnage pour le moins sulfureux.

On peut douter que la loi belge sur les marchés publics autorise de traiter avec des intermédiaires pour des fournitures qui nécessitent un cahier des charges bien spécifique. De plus, ces personnages sulfureux semblent adorer les opérations financières occultes à l’ombre des palmiers des paradis fiscaux. Cette affaire, c’est le moins qu’on puisse dire, a un odorant parfum de scandale !

Ce serait risible s’il ne s’agissait pas de la santé de millions de personnes qui est en jeu ! « On » promet une commission d’enquête sur tous les errements qui se sont produits en Belgique pendant la pandémie… Wait and see, comme disent nos amis britanniques.

Et cela n’empêche pas le pouvoir de traiter ce avec mépris qu’on appelle pudiquement le personnel soignant. Sous payé, surexploité, courant d’énormes risques, la ministre de la Santé n’avait rien trouvé de mieux que de pondre deux arrêtés royaux de réquisition du personnel soignant et même de remplacement des effectifs indisponibles par des soignantes et des soignants non qualifiés ! Après une manifestation spectaculaire et non violente du personnel soignant, lors de la visite de la Première ministre au CHU Saint-Pierre de Bruxelles, le gouvernement a dû suspendre ces dispositions ! Il a senti le vent du boulet de la révolte ! Cet incident est cependant révélateur de l’attitude de « l’élite » à l’égard des travailleurs.

ob 93829a chu saint pierre wilmesA l'arrivée de la voiture de la Première ministre Sophie Wilmes au CHU Saint-Pierre, le personnel soignant forme une haie de déshonneur en tournant le dos au cortège.

La seconde question : celle de la surveillance généralisée. On propose une technique de détection volontaire par smartphones : le tracing. Cela consiste à suivre toute personne ayant un smartphone et qui a téléchargé une application bien spécifique. Lorsque ladite personne rencontre un individu positif au Covid 19 et qui a téléchargé la même application, une alerte se déclenche. Ainsi, les services de recherche parviennent à connaître qui a été en contact avec toute personne « positive », ce qui leur permet de prendre d’éventuelles mesures de confinement. Cela se passe pour le moment en Israël : un individu sain qui aurait été en contact avec une personne positive est sommé de se confiner pendant quatre jours au terme desquels il subit un test de dépistage. Incontestablement, ce système est efficace, mais il pose pas mal de questions sur le plan de la liberté de circulation et de la vie privée, surtout dans un pays comme celui-là !

Anastasia Colosimo, auteur des « bûchers de la liberté », docteur en sciences politiques, voit une rupture avec les valeurs humanistes qui sont censées présider nos sociétés. (Le Figaro du 15 mai 2020) C’est en quelque sorte la prolongation du débat sur le transhumanisme : la technologie va-t-elle dépasser l’homme ? Madame Colosimo se gausse de tous ceux qui s’inquiètent de technologies comme le « tracing ». Elle écrit : « Le plus paradoxal chez ces « mutins de Panurge » est qu’ils confient un nombre incalculable d’informations autrement plus intimes aux Gafa avec lesquels aucun gouvernement ne peut rivaliser en termes de collecte ou de traitement, et cela sans qu’ils s’en émeuvent outre mesure. »

C’est exact. On ne mesure pas notre imprudence lorsque nous jouons avec Google ou Facebook. Cependant, si le tracing ne collecte qu’un nombre restreint d’informations qu’on garantit anonymes, le problème est qu’il va demeurer sous une forme ou sous une autre après la fin de la crise sanitaire. C’est ce qu’explique au Centre d’Action Laïque Madame Annemie Schaus, professeure de droit public à l’ULB. Elle montre dans cette vidéo que si on installe un système de traçage sur la base d’une application pour smartphones, ce système se perpétuera. Et petit à petit, on sera de plus en plus contrôlés sans que l’on puisse s’y opposer et souvent même à notre insu.

RestonsLes propos de Madame Schaus doivent nous faire réfléchir à l'avenir.

Allons-nous vers une « big brotherisation » de notre société ? Bien des éléments donnent à le penser. Voici un exemple édifiant. L’Association des Amis de la Terre démonte le rôle de l’application de vidéoconférence « Zoom » qui a de plus en plus de succès :

« Avec la hausse légitime des pratiques numériques, un logiciel a soudainement connu une grande notoriété, par exemple : Zoom. Il s’agit d’une société américaine de services de téléconférence basée en Californie. Si elle a connu dans un premier temps un succès immense pour son aspect intuitif et sa qualité d’appel (passage de 10 à 200 millions d’utilisateur.rices et une capitalisation boursière deux fois plus élevée que Twitter), la plateforme fait face aujourd’hui à de nombreuses accusations sur ses pratiques de collectes de données et sur la possibilité pour les employeurs de surveiller les travailleur·euses à distance. Effectivement, Zoom a un « indicateur d’attention » qui permet d’indiquer quand un·e utilisateur·rice passe sur une autre fenêtre. Si cela peut paraître justifié pour la prévention contre la triche dans le milieu scolaire, on peut facilement comprendre que cette raison n’est qu’une piètre excuse pour que ce logiciel soit prisé par les entreprises soucieuses de surveiller les faits et gestes de leurs employé·es. (…)

L’un des méfaits les plus récents de cette plateforme est l’envoi des données personnelles de ses utilisateur·rices à Facebook, même pour ceux et celles qui ne sont pas membre du réseau social. Parmi les données recueillies, on retrouve l’adresse postale et l’adresse IP, deux données qui ne sont pourtant absolument pas nécessaires à un logiciel de vidéoconférence. (…)

Ces entreprises ne font qu’évoluer sur leur marché et saisir des opportunités afin de grandir, une tendance d’accumulation de capital propre à notre système économique et qui ne laisse que très peu de place à la condamnation morale. Il est en effet indispensable d’appréhender ces nuisances comme partie d’intégrante du système capitaliste, là où des entreprises vont maximiser leurs profits par le vol de données personnelles, d’autres vont implémenter la 5G, ignorer le confinement, ou vendre des masques hors de prix. Si ces comportements doivent être expliqués, ça ne peut être qu’en tant que volonté de croissance traduisant la peur de disparaître, si on ne grandit pas, on est mangé. C’est la loi de la jungle néolibérale décomplexée qui ignorera toujours l’humain dans ses calculs froids. »

Un ami « facebookien » a retrouvé une citation du « Mein Kampf » d’Adolf Hitler qui s’applique très bien à la situation que nous vivons : « La meilleure façon de contrôler un peuple et de le contrôler complètement, c’est de lui retirer un petit peu de liberté à la fois, pour rogner ses droits par des milliers de réductions minuscules et presque imperceptibles. De cette façon les gens ne verront pas qu’on leur retire ces droits et ces libertés jusqu’au point où ces changements ne pourront plus être inversés. »

Alors, lorsque la crise du COVID-19 sera terminée, tout redeviendra comme avant, comme disent les pessimistes, ou un monde nouveau verra le jour, comme disent les optimistes ? Non ce qui est aujourd’hui provisoire finira par être définitif.

Le combat est loin d’être terminé.

Pierre Verhas

Source: http://uranopole.over-blog.com/2020/05/covid-19-provisoirement-definitif-ou-definitivement-provisoire.html